Antenne d’Oc
1989 année du bicentenaire de la Révolution, cette année là, le 22 mars, va naître au Boulvé, petite commune du canton de Montcuq, l’association Multi-Com dont le but est de faire participer ses adhérents au développement et à l’utilisation des Nouvelles Techniques de Communication. A l’époque Internet n’existe pas, les téléphones portables non plus, mais on parle déjà des NTC, l’ordinateur fait une timide apparition dans le monde rural, le minitel s’impose en mêlant le numérique à la téléphonie. Après une grandiose commémoration du bicentenaire, la petite commune s’interroge sur l’utilité d’installer une salle multimédia (c’est la mode du moment), le Thomson TO7 entrera à l’école primaire, mais la révolution en restera là.
Par contre dans le Lot, les radios associatives qui avaient vu le jour au début des années 80 sont en train de disparaître les unes après les autres, devenues commerciales elles sont rachetées par des grands groupes. Pour Multi-Com un département rural sans radio associative n’est pas acceptable et c’est tout naturellement que l’association fait une demande d’autorisation au CSA. La radio s’appellera Antenne d’Oc, ça fait un peu AOC, couleur locale, et ça plait à l’équipe. Les formalités sont longues, la demande mettra 3 ans à aboutir mais le 23 mai 1993 deux fréquences lui seront attribuées, 89,0 et 93,7 MHz. Ainsi commence l’aventure. Sans argent la débrouille prend le pouvoir, une vieille grange se transforme en studios, il faut tout faire les sols et les plafonds, les murs, les portes et les fenêtres, les cloisons et l’isolation du studio. Les bénévoles entrent en action en six mois l’affaire est bouclée, il faut aussi acheter et installer les 2 émetteurs, un au Boulvé l’autre à Cahors. Pour couvrir Cahors et ses environs le choix de la butte de Trespoux (c’est au pied de cet émetteur que se situe la halle sous laquelle Antenne d’Oc s’apprête à fêter ses 20 ans) parait judicieux et grâce à la compréhension du syndicat des eaux du Quercy Blanc et de son président de l’époque un terrain est mis gratuitement à disposition. Antenne d’Oc commence donc ses émissions à l’automne, avec 100 000 F de dettes et une poignée de bénévoles.
Au début, en 1993, les moyens techniques seront très limités, le personnel est entièrement bénévole, les reportages se font avec deux magnétophones à cassette, ils sont diffusés sans montage ou au mieux le montage se fait à la pause par duplication. La radio émet pourtant 24 h/24, et utilise à cette fin un magnétophone à bande autoreverse avec de grosses galette de bande qui durent quatre heures par face, reste qu’au bout de huit heure si la bande n’est pas changée le programme recommence. Et puis il faut fabriquer ces bandes musicales, un travail fastidieux, Antenne d’Oc se répète un peu trop souvent sur les ondes ce qui lui vaudra de recevoir un appel téléphonique d’un dessinateur en bâtiment de Saint Martin Labouval se plaignant de connaître par cœur le programme mais d’être contraint de l’écouter car dans la vallée encaissée du Lot il ne capte aucune autre radio. Il fallu donc inventer et réaliser une machine automate qui diffuse de façon aléatoire morceau par morceau en utilisant 10 lecteurs de cassettes et deux lecteurs multi-CD. Ce dispositif infernal fonctionna sans faillir jusqu’à ce que les ordinateurs et leur programme de régie automatique assurent la relève.
La radio créera son premier emploi, un contrat CES à l’époque, en 1994, puis petit à petit, un CDI et deux emplois aidés. Les reportages se succédaient sur le terrain, quotidiennement des invités en direct venaient dans les studios, les auditeurs étaient de plus en plus nombreux, tout aller bien, sauf qu’Antenne d’Oc n’émettait que sur une toute petite partie de notre département, Cahors et la basse vallée du Lot. Aussi germa l’idée en 1998 de bâtir un projet de radio départementale et de répondre à un appel à candidature du CSA, et en 2000 Antenne d’Oc pu enfin s’étendre. Le projet comportait la création de 2 studios supplémentaires, un à Cahors et un autre à Bretenoux, avec des programmes locaux et un tronc commun. Les programmes locaux s’appelleraient “Antenne d’Oc – Cahors” et “Antenne d’Oc – Haut Quercy”. Les financement des nouvelles infrastructure sera obtenu auprès du FNADT (aménagement des territoires, 450 KF), du FSER (Fonds de soutien des Radios “A”, 300 KF) et par la Région Midi-Pyrénées (150 KF) soit un budget total d’investissement de 900 KF. Pour aider à la mise en œuvre, le Conseil Général du Lot apportera en fonctionnement 50 KF par radio. Le projet se réalise en 2000, Antenne d’Oc obtient 6 fréquences supplémentaires, Montcuq, Cazals, Gourdon, Souillac, Soucirac, Gramat, Bretenoux, et une deuxième à Cahors. On imagine mal ce que représente sur le plan matériel et humain un tel développement, il faut pour chaque nouvelle infrastructure trouver un emplacement efficient, obtenir les autorisations des propriétaires, les autorisations administratives, faire amener l’électricité, et installer le pylône et le local pour accueillir l’émetteur. Cela demande du temps, du savoir faire et beaucoup d’investissement des personnes qui, rappelons-le, sont le plus souvent des bénévoles. Mais tout ce fait et fin 2001, tout est en place. Bretenoux est bien loin de Cahors et encore plus du Boulvé, une fois les installations financées et opérationnelles, les liens entre les structures vont se distendre, en 2002 Antenne d’Oc – Haut Quercy décide de voler de ses propres ailes et change de nom pour s’appeler Décibel-FM, nom qu’elle porte aujourd’hui. Entre Cahors et Le Boulvé par contre les équipes se resserrent pour ne faire qu’un, et développent ensemble la radio, la production du matin se fait au Boulvé, celle du soir à Cahors, mais les échanges sont constant et les animateurs se suppléent sur le terrain autant que de besoin. Reste que le Lot dans son entier n’est pas couvert par Antenne d’Oc, il manque le Figeacois et depuis la scission le Nord-Est, Val de Cère et Gramat.
2008, nouvel appel à candidature du CSA, la porte est à nouveau ouverte pour tenter un développement, mais initialement cet appel ne prévoit pas de nouvelles fréquences sur les secteurs convoités par notre radio locale. Que faire ? Antenne d’Oc invente un camion-émetteur-laboratoire et, avec le soutien officiel des services techniques du CSA (CTA Midi-Pyrénées), parcours la campagne pour démontrer, mesures et essais à l’appui, qu’il est possible d’utiliser la même fréquence en 2 lieux adjacents si chaque émetteur diffuse le même programme. Cette méthode présente 2 avantages, le premier est qu’il n’y a pas besoin d’occuper une nouvelle fréquence, mais le second est bien plus intéressant, puisqu’il devient obligatoire de diffuser le même programme sur les deux émetteurs ainsi liés, Antenne d’Oc qui est déjà autorisée sur 89.0 et 88.1 MHz ne risque pas de voir ces nouveaux émetteurs lui échapper et être donnés à des “grands” groupes. Ainsi fut fait, et le secteur de Saint-Céré comme celui de Figeac sont dotés depuis des mêmes fréquences que celles de Cahors. Antenne d’Oc installera ensuite des locaux à Figeac, dans un premier temps des locaux sommaires, puis des vrais studios de radios adaptés, rue Émile Zola, il seront inaugurés en novembre 2017. Il aura fallu 24 ans pour bâtir le dispositif actuel !
Un mot pour dire merci à tous ceux qui nous fait confiance et qui, à un moment ou un autre, nous ont aidés, administrations, communes, particuliers et bénévoles, sans eux rien n’aurait été possible.